Les applications innovantes pour les façades étant l’un des thèmes centraux de cette édition, nous nous devions de couvrir ce projet très particulier : la Ceramic House à Amsterdam, un projet du cabinet d’architectes Studio RAP. La façade est composée d’environ 3 000 briques en céramique imprimées en 3D, chacune étant unique et finie selon la méthode artisanale. Le résultat est épatant du point de vue visuel. Nous avons donc eu envie d’examiner plus en détail les aspects techniques.
Le Studio RAP, basé à Rotterdam, n’est pas un cabinet d’architectes au sens classique du terme. À côté des bureaux se trouvent un laboratoire robotique voué à la R&D et des installations de production équipées de bras robotisés de haute technologie utilisés pour développer de nouvelles techniques de fabrication. L’idée est d’appliquer directement ces techniques dans les projets du cabinet d’architectes. Des projets pour le moins… originaux. Outre la Ceramic House, le Theater Zuidplein de Rotterdam est un autre projet qui sort de l’ordinaire. Les murs intérieurs de ce haut lieu culturel de la ville ont été revêtus de pas moins de 6 000 triangles d’aluminium différents, qui soulignent l’esthétique hors du commun du bâtiment tout en optimisant ses performances acoustiques. Dans la même veine que la Ceramic House, citons le New Delft Blue, dont les carreaux de céramique imprimés en 3D sont un clin d’œil au bleu de Delft, une faïence mondialement réputée. Il s’agit d’un autre exemple dans lequel les algorithmes computationnels, les éléments céramiques imprimés en 3D et la méthode d’émaillage artisanale permettent d’apprécier le nouveau potentiel architectural de la céramique.
Une boutique de mode haut de gamme située dans la P.C. Hooftstraat à Amsterdam – l’une des rues commerçantes les plus luxueuses des Pays-Bas – se demandait comment sortir du lot. En s’offrant une façade comme nulle autre ! Un défi que le Studio RAP n’a pas manqué de relever. Bien sûr, il fallait tenir compte des prescriptions esthétiques liées à l’emplacement du bâtiment au cœur d’une ville historique. Mais cela n’a pas empêché l’équipe d’architectes de proposer un concept novateur. Ils se sont mis au travail en puisant leur inspiration dans la mode, et plus particulièrement dans les vêtements en tricot. Wessel van Beerendonk, architecte et cofondateur du Studio RAP : « Lorsque vous regardez un vêtement en maille, vous voyez plusieurs aspects intéressants, que nous avons transposés dans un projet architectonique. Tout d’abord, il y a les plis élégants dans la matière. Ensuite, les fils entrelacés. Et enfin, lorsque vous examinez le vêtement d’encore plus près, le motif des mailles. Ces aspects, nous les avons transférés vers le monde numérique, sous la forme de modèles créés par ordinateur. » Nous entrons ainsi dans une nouvelle ère de la conception numérique, pour une application architecturale inédite.
Toute la façade est revêtue de briques imprimées en 3D, c’est-à-dire fabriquées couche par couche, puis cuites et émaillées de manière artisanale. Le projet impliquait de prendre en compte la silhouette de la façade d’origine, avec sa structure tripartite caractéristique, ainsi que les prescriptions esthétiques. L’échelle, la taille, le type et la couleur des ornements et des matériaux ont été soigneusement sélectionnés pour s’harmoniser avec les bâtiments adjacents. L’objectif étant de réaliser une intégration fluide de l’architecture innovante au sein de l’architecture traditionnelle de la rue. La structure organique et ondulante de la façade en céramique change à mesure que l’on s’approche du bâtiment sous différents angles. Les briques claires du bas – blanc nacré avec une touche de jaune – ont été conçues pour être particulièrement expressives à la hauteur du regard, dans un concept qui s’adoucit peu à peu pour n’être plus qu’un alignement plan au niveau du sol. Aux étages supérieurs, la façade arbore des briques imprimées en 3D et émaillées dans trois tons de rouge. Les détails du motif inspiré de l’art du tricot s’estompent en prenant de la hauteur. Les briques ont été posées en appareil hollandais, soigneusement alignées sur la maçonnerie de la façade adjacente. Placées dans des cassettes en acier inoxydable découpées au laser, les briques ont été collées sur place dans un ordre bien déterminé, il va sans dire. Ce n’était pas une sinécure, mais le résultat en vaut la peine. Un récit teinté de technologies numériques et de « design computationnel » au service d’un langage architectural particulier qui enrichit le monde, le rend plus diversifié, et plus captivant.
FICHE DU PROJET
Projet : Ceramic House
Lieu : Amsterdam
Architecte : Studio RAP